Les grandes familles de Compton : les Ferland

Quelques membres de la grande famille Ferland : Sonia, Lyne, Raoul, Sara, Madeleine, Serge, Suzanne et Martin Photo : Danielle Goyette
Quelques membres de la grande famille Ferland : Sonia, Lyne, Raoul, Sara, Madeleine, Serge, Suzanne et Martin. Photo : Danielle Goyette

Le rêve des Ferland

Peu d’enfants ont cette chance d’avoir connu ou même côtoyé pendant des années leurs grands-parents. Ces doux souvenirs, qui se créent et nous nourrissent, façonnent à leur manière l’adulte en devenir. Pour la famille Ferland, la relation entre grands-parents et petits-enfants a laissé plusieurs traces indélébiles d’amour et de bienveillance. Raoul Ferland et Madeleine Bureau partagent leur histoire avec nous.

Des Beaucerons à Compton

Le 29 octobre 1923, alors âgé de 24 ans, Joël Ferland arrive à Compton. Il quitte Sainte-Marie de Beauce pour s’établir sur une ferme laitière située sur le chemin Robert. Quelques mois plus tard, il épouse Élise Vaillancourt, native de Saint-Bernard de Dorchester. Ensemble, il fonde une famille de neuf enfants : Roméo, Viateur, Laurette, Raoul, Colette, Gisèle, Lise, Huguette et Pierre.

« Les Beaucerons avaient de grosses familles et commençaient à manquer de place! Alors qu’ici, à Compton, il y avait beaucoup d’anglophones avec des familles moins nombreuses et qui n’avaient pas de relève. Les Beaucerons venaient déjà travailler sur leurs fermes ou passaient en train par Compton et apprenaient ainsi qu’il y avait des terres à vendre. Alors, plusieurs sont venus s’y installer. »

De la production laitière à la production de pommes

Viateur reprendra la ferme paternelle en 1958, sa fille Sylvie, puis sa petite-fille, Mylène Foucher, poursuivant dans la même lignée, une belle relève en perspective. De son côté, Raoul achètera en 1960 une parcelle de terre de dix acres appartenant à son beau-père, Maurice Bureau, pour commencer l’exploitation d’un verger sur le chemin de La Station. Il épousera Madeleine Bureau en 1954 et les deux se lanceront dans cette folle aventure où tout est à faire et à apprendre.

Mariage de Madeleine et Raoul en 1954
Mariage de Madeleine et Raoul en 1954

Ils fondent aussi leur famille de cinq enfants : Christiane, Danielle, Lyne, Sonia et Martin. « Assez jeune, j’ai travaillé pour Hertel Gagnon pendant plusieurs années. Ensuite, j’ai été embauché au moulin à grains chez Victor Prévost pendant une dizaine d’années. En même temps, j’ai acheté la terre pour créer un verger. On a commencé la plantation et j’aimais beaucoup travailler dans ce type de production », nous raconte M. Ferland. Il rachètera par la suite la totalité de la terre, soit un cent acres. Pendant quatorze ans, il travaillera aussi à livrer des journaux à la grandeur du Québec. Le projet étant à ses débuts, il y avait beaucoup de dépenses à faire pour acquérir le matériel nécessaire et planter un nombre intéressant de pommiers. 

L’importance de l’entraide

Une valeur revient souvent dans l’histoire des Ferland, celle de l’entraide. À l’arrivée de Joël Ferland, lors du battage des foins, les voisins travaillaient ensemble pour faire la rue au complet avec de l’équipement emprunté ou loué. Pour Raoul et Madeleine, ce sont la famille et les amis qui apportaient du soutien au verger. Madeleine explique : « Fernand Dodier et Adorèle Dallaire, notre couple d’amis, venaient nous aider toutes les fins de semaine et nous rendaient souvent service. Ils nous mijotaient des repas et allaient faire des commissions pour nous. Nos filles aussi faisaient souvent des commissions. Sonia, qui étudiait à Drummondville, descendait toutes les fins de semaine pour s’occuper de sa table de pommes qu’elle plaçait elle-même à son goût. Elle y travaille encore les fins de semaine, en plus de son emploi. J’ai aussi mon beau-frère, Pierre Poirier, qui a beaucoup aidé au verger. Toutes ces personnes nous ont aidés à réaliser notre rêve. Nous en sommes éternellement reconnaissants. » 

Bébé Audrey, fille de Sonia dans le verger.jpg
Bébé Audrey, fille de Sonia, dans le verger

Des pommes et des poires

Compton propose beaucoup de vergers de pommes, mais, quand on parle de poires, le verger Ferland est sur toutes les lèvres! « La plantation de poires, c’est une décision qui a été prise après le gros gel de 1981, ajoute Raoul. La moitié de nos arbres ont éclaté ou étaient gravement endommagés. En faisant le ménage là-dedans, je me suis rendu compte que les quelques poiriers que nous avions plantés étaient encore beaux. Deux ans après, ils produisaient à profusion alors qu’on me disait que les poiriers ne résistaient pas à nos hivers! »

En 1984, M. Ferland retire tous les pommiers morts, refait les terres à neuf, puis plante près de 1100 poiriers. Ce projet étant expérimental et innovant pour le Québec, M. Ferland n’a aucune aide de ses sources principales. « Le gros hic, c’était de trouver quelles variétés planter. Personne n’avait d’expertise autour de moi. Aussi, on me disait qu’il n’y avait pas de marché pour cela au Québec et que j’aurais de la difficulté à faire rentrer mes produits dans les épiceries. Pourtant, j’ai toujours tout vendu, et on en manquait souvent! »   

Le verger compte maintenant 2 400 poiriers. En plus d’offrir 13 variétés de pommes, il est l’un des plus importants producteurs de poires au Québec et l’unique producteur de prunes en Estrie.

Raoul et Madeleine dans leur verger de poires dans les années 1980
Raoul et Madeleine dans leur verger de poires dans les années 1980

Un beigne avec ça?

Vers 1968, le couple Ferland décide d’offrir des produits transformés. Sortant ses recettes et ses talents culinaires, Madeleine a su garnir les tablettes. « J’ai été, en quelque sorte, une pionnière dans l’offre des sous-produits à Compton. Je faisais de la gelée de pommes, de poires, de framboises et de fraises que j’achetais dans le coin. Je faisais aussi de la gelée de menthe que je prenais chez Jacques Ferland. Comme j’étais au kiosque, c’est une employée, Réjeanne Boissonneault, qui faisait les beignes. Le verger a grossi rapidement. J’ai adoré travailler au kiosque. J’avais toujours hâte d’ouvrir en août! »

La relève

Après avoir travaillé coude à coude avec son père, Martin Ferland reprend officiellement le verger en 2001. Il agrémentera l’entreprise avec son projet de cidrerie. Son cidre de glace a gagné cinq fois la médaille d’or à la Coupe des Nations et son cidre aromatisé à l’érable a remporté deux médailles jusqu’à maintenant. Raoul et Madeleine nous expliquent ensemble : « Martin a toujours adoré travailler au verger. Il a tellement d’idées et de projets et il est aussi très manuel et bon en calculs. Il s’est fabriqué une machine pour couper les têtes des arbres et une pour récolter les pommes tombées au sol. Dans mon temps, ça me prenait 15 jeunes pour ramasser les pommes au sol, plus un tracteur qui suivait! »

Depuis, il y a eu beaucoup de mécanisation et de développement au verger Ferland. Entre autres, l’agrandissement et la restauration du kiosque en 2020. 

Noël chez les Ferland

Alors que le temps des Fêtes approche, la famille Ferland se réunira à Compton en bonne compagnie. Les Noëls d’antan font place aux Noëls contemporains, mais se déroulent tout autant dans le plaisir et la joie.

« Dans mon temps, c’était les bas de laine et les oranges. En habitant dans la campagne, on n’a pas eu l’électricité avant les années 1950. C’est plus confortable de nos jours. Comme toujours, on se rassemble en famille. Le Noël se passe chez Martin et le jour de l’an chez Sonia. On va aussi à la messe de minuit. Une année, on a amené notre petite fille, Annie, à la messe de minuit à St-Benoit-du-Lac. Elle nous en parle encore! » 

Pour Madeleine Bureau, plusieurs beaux souvenirs découlent de cette période festive. « De mon côté, mon père aimait beaucoup la musique. Ma mère jouait du piano, et on dansait autour de la table. C’est mon père qui nous a appris à danser. Nous restions près de la station de train, donc nous avions l’électricité et même la voiture! Mon père chantait beaucoup en voiture. À chaque Noël, on allait le voir pour qu’il nous donne la bénédiction. C’était un moment important. » 

Pour Noël comme pour le reste de l’année, on voit bien que la famille Ferland demeure tissée serrée. Dans les bons moments comme dans les plus difficiles, ils savent se soutenir les uns les autres. Quoi de mieux pour atteindre ses rêves?

  • 1re génération: Joël Ferland et Élise Vaillancourt
  • 2e génération : Raoul Ferland et Madeleine Bureau
  • 3e génération : Martin Ferland et Brigitte Carbonneau (maintenant en couple avec Suzanne Boissonneault)
  • 4e génération : Pascal, Étienne, Claudine et Sara qui font partie des huit petits-enfants
  • 5e génération : Maëly et Charles Ferland ainsi que Charles et Elie Castonguay, qui font partie des dix arrière-petits-enfants
La famille réunie lors des 85 ans de Madeleine
La famille réunie lors des 85 ans de Madeleine
Photos : Collection personnelle des Ferland

Vous voulez lire l’histoire d’autres grandes familles de Compton? Rencontrez les Lachance, les Beaudoin ou les Couture!



Jordane Masson - Journaliste

Biographie de Jordane Masson

Journaliste
Native de Martinville, Jordane Masson habite à Compton depuis 2015, et elle a rejoint l’équipe de L’écho de Compton comme journaliste pigiste en 2017. En tant que journaliste pigiste, elle s’occupe de différentes chroniques comme L’écho des Petits, Compton au boulot, Je bénévole et Les Grandes Familles de Compton. Son travail lui demande donc de faire des entrevues, de prendre des photos et de rédiger des articles de différentes longueurs, selon le sujet. En plus de son travail pour L’écho, Jordane est coordonnatrice de la bibliothèque; elle participe à la gestion du milieu et à la programmation des activités, en plus d’animer certaines activités pour les jeunes.
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