« J’ai eu la chance exceptionnelle d’être enseignante! »
Elle les a guidés, les a écoutés, leur a appris tant de choses et… leur a parfois, aussi, secoué les puces. Mais surtout, elle les a tous aimés. Des filles et des gars débordants de potentiel, des éponges d’apprentissage qui, eux aussi, l’ont aimée et ne l’ont jamais oubliée.
Après 34 ans et demi à se consacrer cœur, âme et tête à ses jeunes de 4e, 5e et 6e années, l’enseignante Marie-Claude Gauthier prend sa retraite en juin 2024. Nous avons jasé avec elle de son émouvant parcours.
Marie-Claude a son amour des enfants tatoué sur le cœur. Elle a toujours été enseignante et n’a jamais douté de ce choix de carrière. Elle a enseigné dans quatre lieux différents. Elle a fait sa première année d’enseignement à Rouyn-Noranda en Abitibi, puis 17 années à East-Angus pour se retrouver à l’école Louis-St-Laurent en 2009 et y demeurer jusqu’à aujourd’hui.
« J’ai toujours travaillé avec les grands, 4e, 5e ou 6e année! J’adore les grands pour le lien privilégié qu’on peut développer avec eux, pour la complicité, pour les petites blagues que je peux dire, parce qu’on peut faire comprendre certaines choses de la vie sur l’alimentation, le corps humain, la puberté, etc. en discutant avec eux. »
La Suisse une expérience exceptionnelle
À sa 5e année d’enseignement, Marie-Claude a appliqué sur un projet d’échange de professeurs à Fribourg en Suisse. Elle changeait de classe et d’appartement avec l’autre professeur pendant toute une année. « J’étais toute jeune, j’ai célébré mes 30 ans là-bas! C’était une classe de 2e année, ce qui était bien différent pour moi. C’était très exigeant, mais ça a été une année charnière dans ma vie pour tout ce que j’y ai appris et les liens que j’ai conservés à jamais! »
Lors d’une de ses visites en Suisse une vingtaine d’années plus tard, une amie lui a même fait la surprise de réunir tous les élèves de sa classe. Revoir ces enfants devenus des adultes a profondément ému Marie-Claude. « Ce moment-là est tout à fait inoubliable pour moi, c’est certainement l’un des plus beaux moments de ma vie. Ils avaient un métier, certains étaient mariés, avaient une maison, des enfants… Quelles retrouvailles émouvantes! »
Un coffre au trésor de souvenirs
« Je ne suis pas une prof spectaculaire, mais je suis une prof dans l’amour du quotidien! »
Le partage de choses simples, de milliers de petits moments de bonheur, de joies d’apprendre, d’activités en groupe… C’est ainsi que Marie-Claude a ponctué son quotidien avec ses jeunes élèves. « En plus des matières régulières, je leur faisais parfois apprendre des chansons de Noël pour aller chanter avec eux chez les personnes âgées à la résidence… Chaque Noël, j’avais une tradition, on se mettait tous en pyjamas et en pantoufles, on se faisait un brunch tous ensemble, on regardait un film… D’autres fois, on se montait des tentes avec des couvertures, les élèves apportaient des lampes de poche et on lisait sous les tentes. Jamais ils n’ont autant lu que ces journées-là! C’est fou, ils étaient heureux, ils lisaient, c’était silencieux, je n’entendais pas un mot! »
L’enseignante n’a jamais manqué d’idées pour réjouir ses jeunes et faire en sorte qu’ils échangent entre eux, qu’ils vivent des moments enrichissants et qu’ils se créent de beaux souvenirs. Célébrer l’Halloween, faire des bonbonnières de Noël avec les restes de bonbons d’Halloween, ramasser des crayons-feutres, des sacs en plastique ou de la styromousse pour les recycler, parler de bonne alimentation et la mettre en pratique, faire des voyages de fin d’année à Montréal ou à Québec…
Et c’est sans compter toutes les fois où ses élèves ont agi en complices pour lui faire des surprises à son anniversaire, à Noël et en d’autres moments de la sorte.
Une meilleure humaine grâce à eux
« Ces beaux amours-là m’ont aidée à ne jamais avoir d’œillères. Derrière chaque enfant, il y a une vie et il y a une famille. Ce que j’ai devant moi, ce n’est pas une matière malléable, c’est un humain qui grandit avec le bagage qu’il a, qui a besoin de cadre, de guide… oui parfois, je devais mettre le cadre plus serré parce qu’un enfant en avait plus besoin qu’un autre. Et je demeure convaincue, à la fin de ma carrière, que chaque enfant a besoin d’un cadre et qu’il évolue mieux quand il est bien encadré. »
Quand il y avait quelque chose qui n’allait pas, Marie-Claude savait qu’il y avait quelque chose derrière cela. Elle disait à l’enfant de venir la voir pour prendre le temps d’en parler. Qu’est-ce qui se passe, qu’est-ce qu’on peut faire avec cela? Et ils trouvaient ensemble ce qui pouvait être fait pour améliorer la situation.
« J’ai eu une relation privilégiée avec mes élèves et aussi avec tous ceux avec qui j’ai travaillé. Quels beaux souvenirs, j’ai accumulé! Chaque fois que je rencontre un ancien élève, je suis très émue de l’entendre parler de ce qu’il est devenu et des souvenirs qu’il garde de notre année ensemble. J’espère que ces jeunes ont senti comment je les ai aimés et j’espère avoir éclairé un peu leur vie pour leur donner l’espoir d’être contents de continuer! De mon côté, ce que je suis certaine à 100 %, c’est que j’ai traité les nombreux enfants à qui j’ai enseigné exactement comme j’ai traité ma fille. Les décisions, je les ai prises chaque fois pour le bien de l’enfant et si ça avait été ma fille, j’aurais pris la même décision.
Et en retour, ces élèves m’ont tellement nourrie, ils ont tellement enrichi ma vie, ces enfants-là ont vraiment fait de moi une meilleure humaine! »
Et si jamais, dans les années à venir, il y avait une possibilité de suppléance à l’école, Marie-Claude se dit qu’elle serait bien heureuse de revoir les enfants et ses collègues!
« Chaque fin d’année, j’avais un rituel secret. Je vous le confie. La dernière journée que mes élèves partaient en autobus, pour ne pas me liquéfier en larmes à ce moment-là, je faisais une prière à la vie et je lui disais : La vie, je te confie ces enfants-là, je leur ai tout donné ce que je pouvais, aime-les comme je les ai aimés, prends-en soin, je t’en supplie, maintenant c’est à ton tour de faire ton bout de chemin. »
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