Les animaux de ferme ont-ils froid?

Les petits cochons de la ferme Lennon dans la neige
Les porcs de la Ferme Lennon adorent la neige. Photo: Ferme Lennon

Danielle Goyette

20.04.2021

Texte gagnant du Deuxième Prix catégorie Reportage aux Grands Prix de l’Association des Médias écrits communautaires du Québec 2020

Le moins que l’on puisse dire, c’est que nous subissons un hiver des plus rigoureux cette année. Qu’en est-il des vaches et des porcs? Le froid les accable-t-il, eux aussi? Des producteurs nous parlent des conditions hivernales de leurs bêtes.

Après plusieurs discussions avec différents producteurs, on comprend bien vite que les vaches et même les porcs aiment mieux le froid que la chaleur. Ces animaux sont, à vrai dire, d’extraordinaires sources calorifiques!

« La plus grande adaptation au froid est pour nous, les humains, nous affirme Jérôme Mercier de la Ferme Valley Clan. Les bovins, eux, sont très à l’aise à des températures pouvant descendre jusqu’à – 37 °C. Par contre, ils ne se sentent pas bien à des températures de plus 20 °C. Nos meilleures saisons de production sont plutôt l’automne, l’hiver, le printemps que l’hiver. Dans les grandes chaleurs d’été, les vaches ne sont pas heureuses, elles ventilent, elles essaient de se refroidir, elles produisent aussi moins de lait. Il faut savoir qu’une vache a la température du corps à 1,5 °C plus élevé que celle du corps humain et elle peut produire 4 500 BTU (1 318 watts/heure) de chaleur par heure. C’est pour cela que dans une étable qui se maintient à 5-10 °C, elles sont très bien. Ces animaux sont des chaufferettes portatives! En plus, on les rase, car une vache à poil long va suer beaucoup trop et aura ensuite froid. C’est ainsi qu’elle risque de développer une pneumonie. Quand on lui enlève son poil, elle peut dégager sa chaleur au lieu de la conserver en trop grande quantité sur son corps. Nos bâtiments n’ont ainsi pas besoin d’être chauffés, mais seulement isolés. L’important est de ventiler pour en faire sortir l’humidité et l’air vicié. Chez nous, les vaches profitent aussi d’une belle innovation depuis deux ans. Elles jouissent dorénavant d’une grande aire de repos recouverte de litière compostée composée de brans de scie qui se tient à près de 40 °C. Les vaches se couchent là-dessus et c’est très confortable pour elles. C’est beau de les voir paresser en tout confort. »

Le pire ennemi ? Les changements drastiques

Du côté de la ferme Stéronest qui compte près de 600 vaches Holstein, Sébastien Vaillancourt nous explique que l’important, c’est toujours de fournir aux bêtes, un endroit sec exempt de courant d’air ou de couloir de vent, et ce, quelle que soit la saison. « Cette race de vaches a une bonne résistance au froid. Leur poil réussit normalement bien à les protéger. Par contre, parfois, les veaux vont nécessiter un bâtiment chauffé par grands froids. Il faut éviter que les vaches attrapent une infection, car elles peuvent développer des pneumonies, et cela, malgré les vaccins. Les infections pulmonaires arrivent surtout par temps de grands froids ou en présence de courants d’air, mais surtout lors de changements drastiques de température ou aux changements de saisons. C’est pourquoi nous devons toujours bien ajuster la ventilation des bâtiments selon la météo puisque, au bout du compte, les animaux doivent n’en ressentir les effets que le moins possible. »

Vive l’hiver, finalement!

Quant à la ferme de La Station, les vaches, elles, prennent l’air tout l’hiver! « Chez nous, depuis maintenant quatre ans, les taures et les génisses passent presque tout l’hiver à l’extérieur, nous raconte Vincent Bolduc. Elles sont une quarantaine dehors alors qu’on en a près de 90 adultes à l’intérieur en production laitière. Les bêtes à l’extérieur y mangent et boivent leur eau dans des abreuvoirs chauffés. Elles dorment sous un abri au sol recouvert de litière propre et sèche. On leur laisse leurs poils pour les garder plus au chaud alors que celles à l’intérieur sont rasées. À l’extérieur, les vaches consomment plus aussi. C’est leur façon de combattre le froid. Comme ça, elle fabrique plus de chaleur. Souvent, par temps froids, on augmente aussi la source d’énergie dans la moulée en y ajoutant du maïs. Plus il fait froid, plus elles mangent! »

À la Ferme La Station, les vaches prennent l’air tout l’hiver.
Photo: Ferme La Station

Et du côté des porcheries?

Dans une porcherie, on apprend que l’important demeure toujours la bonne ventilation. Guillaume D’Amours de la Porcherie R.G. D’Amours, qui compte près de 3 000 porcs, nous fait part de ses préoccupations par temps froid. « Quand le mercure baisse dehors, il faut surveiller la bonne circulation d’air à l’intérieur, en s’assurant que ce soit bien ventilé, mais sans trop évacuer de chaleur. On procède donc par contrôle automatisé afin que la ventilation soit appropriée. La chaleur doit être continue à 18-20 °C pour les adultes à 24 °C pour les petits. Quand les animaux ont froid, on les voit se coucher les uns contre les autres dans leur parc, et même, parfois, les uns par-dessus les autres. C’est dans ce temps-là qu’on sait qu’il faut ajuster la ventilation! »

Leur propre source de chaleur

À la Ferme Porcine HP inc., reconnue pour ses porcs sans antibiotiques, Sébastien Paré et Dana Hafford mettent tout en œuvre pour prendre grand soin d’éviter la prise de ces médicaments chez leurs bêtes. Dana Hafford nous explique la chose. « On surveille étroitement l’humidité dans les bâtiments, car c’est cela qui peut être la source d’inconfort et le changement de température peut aussi causer des infections chez les animaux. Si un animal doit absolument être traité par antibiotique, il sera classé « porc conventionnel » sur le marché, alors que les autres animaux de la ferme sont classés « sans antibiotiques ». Nous avons trois grands bâtiments tous chauffés au propane. Un bâtiment avec 200 truies, un pour l’engraissement avec 1 500 porcs et un autre pour la pouponnière avec 500 porcelets. On conserve les deux derniers entre 17 et 20 °C alors que la maternité est tenue autour de 23 °C. Dans le bâtiment d’engraissement, il y a assez d’animaux qu’ils deviennent, à eux-mêmes, une source de chaleur. Le plus important demeure toujours de surveiller la ventilation pour que l’air circule bien et que l’humidité n’imprègne pas les lieux. C’est à la base même du bien-être de nos animaux et cela contribue aussi à maîtriser la propagation de maladies. »

Finalement, un cochon non plus n’a vraiment pas peur du froid!

Habituellement, les porcs de la Ferme Lennon aiment à gambader en liberté dans leur parc extérieur. Or, cette année, quand les champs étaient favorables, il faisait trop froid et quand il faisait moins froid, la pluie finissait en verglas et pouvait engendrer des chutes chez les bêtes. Philippe Lessard en discute avec nous. « Cet hiver, à cause des sautes d’humeur de dame Nature, les porcs adultes sont demeurés en grande partie à l’abri dans le grand bâtiment qui leur est attitré. Cet abri-là n’est pas isolé et il compte huit enclos au sol recouvert de paille, de brans de scie et muni d’abreuvoirs chauffants. Quand il fait plus froid, les porcs se couchent les uns par-dessus les autres pour se réchauffer. Ça fait des petits tas de cochons ici et là! Mais, malgré cela, je n’ai jamais eu de porcs morts de froid. Quant à la pouponnière, elle est isolée et se tient à 10 °C. Pour les mères et leurs petits, il y a des niches avec des lampes chauffantes qui conservent la température à près de 20 °C. Les petits demeurent là environ 30 jours. Pendant l’hiver, ça prend un peu plus de temps pour engraisser un cochon, car il utilise une part de son énergie à se réchauffer. Il mange un peu plus et plus encore quand il fait froid. Il est clair qu’un porc coûte nécessairement plus cher à engraisser en hiver qu’en été. »

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